Premiers pas à kid’s corner

seance dessin a kid's corner

Depuis mon installation à Hohoe, Les jours défilent à nouveau et j’ai du coup un peu délaissé le blog comme vous avez pu le voir. La vie sédentaire amène son confort mais a un certain prix, dérangement, des petits ennuis quotidiens. Attendre l’électricien, un autre gars pour réparer le frigo, faire des courses, stocker de l’eau pour la prochaine coupure, éponger l’eau du frigo qui inonde la cuisine à chaque coupure d’électricité (tous les 2 jours environ), scruter le ciel pour voir s’il va pleuvoir et s’il faut rentrer le linge avant de partir… enfin tout plein de choses que j’avais pour ainsi dire oubliées ces 7 derniers mois, enfin presque…

J’habite un peu au nord de la ville, après le quartier musulman, ce qui me laisse le bonheur d’entendre l’appel de la mosquée (j’aime toujours bien ça, je sais pas pourquoi), et bien peu d’église au pasteur criard (juste le dimanche matin à partir de 9h). La maison n’est pas pour autant isolée : dans “la cour” il y a 3 autres familles - assez sympathiques, on partage les toilettes et la douche avec une d’entre elles. Mais un peu matinale à mon goût… j’avoue que je ne me lève pas encore tous les jours entre 5h et 6h du matin comme tout le monde en Afrique.

C’est la première maison de Liz (la fondatrice) qui la sous-loue aux bénévoles la plupart du temps. Il est assez difficile de louer au Ghana pour une courte durée, le minimum est de louer pour 2 ans à Hohoe. Je pensais être hébergé dans une famille dans un premier temps, mais après les anecdotes que j’ai eues des autres volontaires, je n’ai pas de regrets. Le confort n’est pas le même, mais ce n’est pas vraiment le problème… quoique les toilettes à l’exterieur sans mur avec les voisins qui vous regardent faire, j’avoue que j’ai pas essayé.

Le problème est de faire partie de la famille, pas aussi libre de faire ce que l’on veut, la femme attend le soir le retour, fait à manger, insiste pour aller à la messe, plus les incompréhensions interculturelles. Et dans certains cas (pas tous), il faut bien assister, assez impuissant, à la méthode d’éducation locale, à grands coups de canne sur les enfants. Notez que c’est pareil chez mes voisins, de bon matin j’entends souvent ma voisine lancer de grands coups de canne “vlam, vlam, vlam” et des cris et des pleurs. Mais c’est toujours pareil, quand ce n’est pas chez soi on se sent toujours moins concerné et impliqué, on oublie plus vite.

Pour le moment, je suis avec 2 autre colocataires mais elles repartent bientôt, elles ont bientôt fini et sont parties en vacances sur la côte avec une autre bénévole (qui est hébergée dans une famille). Mais je ne suis pas resté seul bien longtemps, un autre gars est venu en ville. Au départ juste en touriste, il a travaillé 4 mois au Ghana et il avait 1 mois de vacances, mais finalement il a changé d’avis et décide de passer le reste de son temps comme volontaire avec nous. C’est mon nouveau colocataire. Apparemment cela arrive de temps en temps, les voyageurs arrivent et décident de s’arrêter pour quelques temps. Souvent ceux sont des volontaires d’autres associations à la recherche d’un autre projet. Ils ont juste découvert que ce pour quoi ils étaient venus est juste une excuse, une arnaque plus ou moins bien huilée pour faire du fric. C’était le mode principal de récupérer des volontaires par le passé. Mais à force, les volontaires parlent de leur expérience sur le web, certains, en recherche d’une association, les lisent et prennent contact. Et l’an dernier, une équipe est venue faire un documentaire qui a été diffusé à plusieurs reprises sur des chaînes de télé allemande. Comme le reportage donne une image très positive (un peu trop idéalisée d’après Liz), beaucoup de gens la contactent à présent. Par exemple, cet été un groupe de 15 jeunes doit venir au mois d’août.

Comment vous décrire une journée type (en plus de Samuel ? Il faut dire que depuis mon passage il y a 2 ans, il n’y a plus un seul centre Kid’s Corner mais 4 centres, un à Hohoe et dans 3 villages alentour. Ca s’est fait doucement, et à chaque fois grâce à des personnes du village motivées qui souhaitent développer la même chose qu’à Hohoe. Chaque centre est différent, mais tous se doivent de respecter une charte commune, en gros proposer des activités aux enfants après l’école sans châtiments corporels, ce qui n’est pas aussi naturel qu’il y paraît. Hohoe fournit des idées, du matériel, et des volontaires vont chaque semaine dans les villages pour aider la personne sur place. Tout ça a pris plus d’un an, mais maintenant que la confiance est là, les premiers matériels envoyés vont être complétés par ces boites rouges que l’on va remplir de jeux, livres, stylos, papiers, etc.

Vers 13h la faim me rattrape, je vais dans la rue, tout ce rouge m’a donné envie de prendre un bon plat de haricots local sauce rouge et bananes plantins grillées. Vite avalé, ce jour là en rentrant, j’ai le plaisir de croiser un des ces vélos fan-milk klaxonnant ma nouvelle irrésistible tentation, une sorte de glace vanille. Vers 2h, les portes s’ouvrent pour les enfants jusqu’à 5h. C’est le rush, je n’ai aucune expérience sur le sujet, et je peux vous dire que ce n’est pas de tout repos. Un des problèmes est que le centre est victime de son succès, beaucoup (trop) d’enfants arrivent petit à petit à la fin de leur cours, les plus jeunes sont les plus nombreux. Même avec des jours réservés avec des classes d’âge, la pièce en devient vite trop petite et grouillante, plus de 60 enfants est souvent la norme et les jours de films j’ai compté jusqu’à 150 enfants (il y a plus de 3000 inscrits au total).

Le programme classique est lecture de 2h à 3h et jeux après de 3h à 5h, je vais vous épargner le détail des activités. Rien d’exceptionnel vous me direz, mais il faut bien comprendre qu’ici, cela l’est. Les livres ne sont pas courants ; même dans les classes privées les livres de cours sont souvent à partager entre 5 enfants (pour le public il n’y en a pas). Je parle pas de livres pour enfants ou de romans inconnus au départ. De même avant de venir ici, les enfants ne dessinent pour ainsi dire jamais, on ne gaspille pas le papier pour ça. Quant aux jouets, ils sont tout simplement inconnus. Cela ne veut pas dire qu’ils ne jouaient pas avant, quand ils n’ont pas à aider à la maison ou vendre des choses dans la rue, les garçons jouent au foot (pas avec un vrai ballon bien sur) et les filles à un drôle de jeu où elle sautent en l’air en claquant des mains et avancent un pied en retombant sur terre.
Bien sûr, l’abondance de matériel n’est pas une fin en soi, on n’a pas besoin de tant que ça pour s’amuser (et éduquer). Le but est de leur proposer des choses différentes, qu’ils puissent les essayer sans crainte d’être cannés.

Moi qui ne pensais pas avoir la patience avec les enfants (pour ne pas dire pire), pour le moment je découvre tout ça avec beaucoup de plaisir. Ce rapport direct, entre ce que l’on fait et la “récompense” (ou pas) de la réaction de l’enfant, c’est assez nouveau et gratifiant. Dans le travail que je fais habituellement cela n’existe pas vraiment. Enfin pour le moment, je découvre tout ça. Après 5h, les enfants repartent, certains avec un livre de la bibliothèque. Ce qui peut paraître surprenant, ils sont fouillés à la sortie, il y a eu beaucoup de vols pendant un moment (surtout les plus petits). Pour la petite histoire, ce problème de vol existe juste à Hohoe, dans les villages cela n’existe pas, trop petit, tout le monde se connaît et cela se saurait vite. Après cela, on range, on fait quelques trucs s’il y a des choses à préparer, et après je vais saluer mes connaissances en ville et faire mes courses.

Ce soir là, on a tous été boire un verre dans un des bars de la ville qui crachent de la hiplife après avoir mangé un bon banku… retour sous la pluie, la saison des pluies est bien là, des trombes d’eau tombent très régulièrement avec des éclairs incroyables. Je me sèche et m’effondre dans mon lit avant de recommencer un nouveau jour.