Crochet à Oualata et en piste pour le Mali

Chameaux et vent de sable

De Ayoun je pensais mettre 2 jours pour arriver à Oualata, mais c’était mon jour de chance. J’ai de suite trouvé un taxi qui filait à 110 km/h sur le goudron. Après plusieurs jours de camion et des pointes à 70 km/h, j’ai l’impression d’être dans un jeu vidéo où il faut éviter les nids de poule. Je retrouve aussi le relatif inconfort d’être à trois à l’avant d’une Mercedes. Alors que je râle intérieurement d’avoir le cul sur le levier de vitesse, mon voisin militaire se fait vomir dessus par le gamin assis derrière sur les genoux de sa mère. Finalement je ne suis pas si mal placé que ça …Après 5 heures de taxi, j’arrive à Nema en début d’après-midi et je pars à la recherche d’un transport pour Oualata. A Nema, c’est la fin de (la route) de l’espoir - au nord 3h de piste pour Oualata, à l’est 3 jours de piste pour Tombouctou et au sud 5h de piste pour Adel Bagrou (la frontière avec le Mali).

C’est un commerçant qui fait un aller le matin et le retour le soir pour la cité historique avec un pick-up 4×4 Toyota (le taxi du désert). Apparemment il reste une place, naïvement j’espère même être dans la cabine en voyant le chargement de sacs grossir à l’arrière. Une petite heure plus tard, ils finissent par mettre le filet pour maintenir le tout, et comme prévu, le chauffeur en souriant me dit “vas-y monte”.

Au départ c’est un plaisir assez enfantin que d’être haut perché à l’air libre, à regarder les paysages défiler sans contrainte, tout en se faisant bouger dans tous les sens par la piste. Mais après 3 heures, totalement recouvert de sable et crevé, il me tarde d’arriver. Le soir je retrouve à ma grande surprise l’auberge les 2 italiens de Dakhla, ils repartent le lendemain et on aura pas beaucoup de temps pour parler car je suis malade ce soir là. Premières diarrhées éclair (j’ai pas cru arriver aux toilettes à 10 m de ma chambre), la fraîcheur d’un plat mauritanien aura eu raison de mon estomac - pour la première fois en presque 3 mois.

Le lendemain je vais bien et j’en profite pour me balader dans le village - tout y est calme. Des rues souvent désertes, avec les maisons et leurs célèbres décorations (spécialités locales), et puis sur la plaine les troupeaux de chameaux qui se relaient autour du puits. Même si je croise des “hommes bleus”, la peau colorée par l’indigo des vêtements protégeant leur peau du soleil, le temps du nomadisme n’est plus la règle - la plupart sont sédentaires depuis bien longtemps. Mais il reste encore quelques caravanes qui suivent la route historique jusqu’à Tichitt (10 jours de dromadaires ou 3 jours de 4×4). Bien sur le sable est omniprésent, il grapille sur les maisons et les recouvre parfois - lutte perpétuelle pour ne pas se faire recouvrir.

Fait assez rare, depuis 1 an le village a accès à l’électricité et l’eau est traitée via un groupe fonctionnant au pétrole. Pendant mon séjour, il n’y avait plus d’électricité et le responsable (privé) de Nouakchott ne semblait pas bien pressé pour envoyer un camion d’essence. Ce qui m’a donné des soirées de silence incroyable dans cette vallée noyée dans les étoiles. Décidément je ne regrette pas mon détour.

Cela a beau être la pleine saison touristique, je n’aurai pas vu un touriste après les Italiens durant les 3 jours. Après ce court repos sur la route, il est temps pour moi de repartir, il semble possible d’atteindre Nara au Mali via Nema en 1 jour. Le retour en pick-up à Nema est plus confortable, l’arrière n’a plus de chargement et mon sac fait un bien meilleur coussin et surtout, en étant plus bas je ne fais plus bouger dans tous les sens. J’espérais enchaîner sur un autre pick-up mais il m’aura fallu attendre 4h pour voir enfin le pick-up pour la frontière (Adel Bagrou) partir en fin d’après-midi. J’ai, cette fois, le confort d’une place en cabine et heureusement, car en plus du sable et de l’inconfort, avec la nuit se rajoute le froid !

Le trajet est assez long, entre les différents arrêts pour poser des sacs dans les petits villages (quelques tentes isolées) et une crevaison, on arrive trop tard à Adel Bagrou pour que je trouve un transport pour Nara. Comme il n’y a absolument rien dans cette ville (resto ou logement), mon voisin a eu l’idée de m’emmener après le village au poste de douane, ce qui fait bien rire le chauffeur. Il y a juste un jeune gars qui est de corvée dans ces 2 pièces vides qui servent de poste frontière, qui m’accueille sans grand enthousiasme.

Drôle de symbole, je passerai ma derniere nuit en Mauritanie à dormir sur le béton dans un poste de police, heureusement qu’il me restait une boite de sardines sinon j’aurais pas pu manger. La nuit fût courte, plus à cause des souris qui courent dans tous les sens autour de moi que du béton et le lendemain il me tarde de partir. Il me faudra attendre tout de même 10h30 pour que le chef débarque pour me faire le tampon et 13h pour voir le premier véhicule passer - un camion qui fait le transport Malien entre les 2 petites villes des 2 pays. Record de vitesse battu - 2h30 pour 46 kms -, et heureusement qu’il ne pouvait pas aller vite car il n’avait pas de frein, ce qui demande un peu d’anticipation, quelques centaines de mètres pour s’arrêter ! Mais peu importe, ça y est, je suis au Mali et j’espère bien dire au revoir à ces mauvaises pistes et retrouver un peu plus de vie…